Richard Dean : Souvenirs de course au Japon
Le patron de l'équipe United Autosports USA, Richard Dean, livre ses réflexions sur ses courses au Japon.
Durant trois ans, entre 1992 et 1995, Richard Dean, patron de l’équipe United Autosports USA, a disputé des courses de F3, de Tourisme, de GT et de F3000 au Japon.
Il a piloté pour les équipes Team Le Mans, Team 5Zihen et Tomei, vainqueur en F3 et est devenu un pilote Gaijin bien connu aux côtés de Rickard Rydell, Mauro Martini, Roland Ratzenberger, Sascha Maassen et Michael Krumm.
Il évoque ici son séjour au Japon, alors qu'il se prépare à retourner sur le Fuji International Speedway pour la prochaine manche du championnat du monde d'endurance FIA.
Comment avez-vous appréhendé la course automobile au Japon ? Et comment cela se passait entre les pilotes à l'époque ?
« La première chose qui me vient à l'esprit est le professionnalisme des courses au Japon. Quand vous avez couru en Europe, comme je l'ai fait en Formule 3 et en Formule 3000, vous pensiez que c'est le summum, le nec plus ultra en dehors de la Formule 1. Le Japon m'a étonné par le professionnalisme, non seulement des pilotes et des équipes, mais aussi par la qualité des circuits. J’y ai trouvé un niveau beaucoup plus élevé. C'est la chose qui m’est resté de mon séjour là-bas, le niveau était vraiment élevé. La camaraderie entre les pilotes ?.... je me souviens qu’il y avait deux groupes - les pilotes locaux ou japonais qui avaient naturellement tendance à être dans leur propre groupe et les gars occidentaux qui couraient au Japon à plein temps, qui restaient tous ensemble et la plupart d'entre eux vivaient à Gotemba. Entre les courses, nous nous retrouvions tous et je me souviens que lorsque je suis arrivé là-bas, c'était un peu comme le premier jour d'un nouveau job où vous ne connaissez personne et vous êtes un peu intimidé….mais il ne m’a pas fallu bien longtemps pour développer des amitiés. Nous passions beaucoup de temps ensemble. Tous ne restaient pas au Japon entre les courses mais ceux qui le faisaient avaient toujours des projets. Nous allions sur les circuits ensemble, nous jouions au squash ensemble, nous nous entraînions ensemble, nous sortions ensemble et nous faisions du tourisme ensemble. Donc, c'était des bons moments. »
Why did you decide to race in Japan?
« La vraie raison n'est probablement pas celle que les gens veulent entendre. J'étais, en quelque sorte, à court d'options en Europe et j'étais un peu dans une impasse. J'avais fait de la F3 et de la F3000, et en termes de carrière, essayer de passer à l'étape suivante était difficile. Ce n'était pas vraiment dans leur esprit au départ, mais j'ai eu l'opportunité de faire un test au Japon avec la société Le Mans en F3. Ils étaient importateurs Reynard pour le Japon. C'était un peu comme une bouée de sauvetage, un nouveau chapitre, une nouvelle opportunité, une nouvelle aventure. J'étais à court d'options au Royaume-Uni et en Europe. C'est ce qui m'a poussé à y aller et au final, cela s'est avéré être le meilleur choix. »
Où viviez-vous au Japon ? et en quoi était-ce différent du mode de vie au Royaume-Uni ?
« J’ai vécu au Japon, depuis la fin de 1992. Je suis resté en 1993, 1994 et une partie de 1995. Je faisais aussi un peu la navette pour voir ma famille et c'est à cette époque que ma fille est née. Elle est née au Royaume-Uni et évidemment, je suis revenu pour ces raisons familiales. Mais le Japon a été ma maison pendant ces trois années. Le Japon n'aurait pas pu être plus différent de l'éducation que j'ai reçue au Royaume-Uni et, au début, ça a été un véritable choc culturel.
Ayant dirigé une équipe de Formule Ford et une équipe de Formule Vauxhall Junior dans les années 90, avant mon départ pour le Japon, nous avons eu quelques pilotes japonais qui sont venus chez nous et qui ont couru pour nous. J’ai remarqué exactement la même chose chez eux. J'avai pu voir à quel point c'était un choc aussi pour les pilotes japonais de venir en Europe, pas seulement au niveau la langue, de la nourriture et de la culture., mais aussi au niveau des compétitions et la vie de tous les jours. C'était exactement la même chose pour moi mais en sens inverse. Le premier mois a été un choc, je pense que les deux mois suivant, je me suis demandé si ma décision était raisonnable. Après six mois, j'ai commencé à penser que j'avais fait le bon choix et peu de temps après, j'ai absolument adoré ça et mon plus grand regret est d'être revenu trop tôt, nous aurions dû continuer et aller de l'avant. Nous sommes tous plus sages maintenant et sachant ce que je sais maintenant, c'était une vie incroyable, une opportunité inouïe. J'ai adoré vivre là-bas, j'ai aimé les gens, j'ai tout aimé et j'en garde de bons souvenirs. »
Que pensez-vous du niveau de la compétition de l'époque ? Était-il plus difficile d'affronter les pilotes locaux ?
« J’ai été surpris par autre chose. Vous partez là-bas avec un certain niveau de confiance en vos capacités et très probablement une certaine arrogance quant à ce que vous allez faire. Je ne pensais pas que le Japon allait être aussi intense. Je ne pensais pas que la compétition serait aussi rude. Vous avez l'impression que vous allez affronter les pilotes de renom, dont certains des pilotes occidentaux qui étaient là-bas. J'étais avec Tom Kristensen, Rickard Rydell, Sasha Maassen et Warren Hughes qui étaient de très bons pilotes. »
« Vous pensez qu'il va y avoir une compétition, et ce qui m'a vraiment surpris, c'est la qualité des pilotes locaux. On ne s'y attend pas parce qu'on n'en rencontre pas beaucoup quand on roule dans les séries juniors en Europe. Mais quand vous êtes là-bas, vous mesurez le niveau de la compétition atteint et de leur dévouement, de leur engagement, aussi fort que n'importe quel autre pilote que vous avez rencontré auparavant. C'était particulièrement difficile. Et puis évidemment, leur connaissance des circuits leur donnait cet avantage qu'il fallait surmonter. Donc, c'était dur, mais c'est ce qui rendait les choses amusantes. »
Quels souvenirs marquants gardez-vous des courses au Japon ?
« Lors de ma première course en Formule 3 à Suzuka, j'ai décroché la pole position, c'est un souvenir très fort. J'ai aussi gagné à Suzuka et je suis monté sur le podium avec un très bon ami avec qui je suis resté en contact - Sascha Maassen. Nous étions équipiers et nous sommes montés sur le podium ensemble, ce qui était fantastique. Il y avait aussi Michael Krumm, qui était un très bon ami. Courir contre ces gars-là, et évidemment Tom Kristensen est aussi un bon souvenir. »
Quel souvenir gardez-vous de la course à Fuji ?
« Chaque course à Fuji était une aventure car les conditions météorologiques changeaient constamment. Vous pouviez arriver sur le circuit et y affronter du brouillard, du soleil et de la pluie. Il y a eu une course, ça devait être ma première année là-bas en 1993 et c'était sous une pluie torrentielle. Je me souviens avoir conduit en pensant qu'ils allaient arrêter ça, mais ils ne l'ont pas fait et il semblait que c'était normal pour les Japonais. Vous pouviez à peine garder la voiture sur la piste. Fuji propose toujours quelque chose de différent et quand vous regardez l'histoire de Fuji, quand je regardais la Formule 1 quand j'étais enfant, c'est un circuit tellement imprévisible, c'est ce qui le rend unique, amusant et un véritable challenge. »